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Vivre la maternité et ses ambiguïtés :Chronique du roman" Apaiser nos tempêtes " de Jean Hegland

Dernière mise à jour : 20 mars

Beaucoup de livres évoquent le rapport parent/enfant du point de vue de ces derniers. Dans son roman « Apaiser nos tempêtes », Jean Hegland a voulu parler des ambivalences et des sentiments liées à la maternité à travers le destin de deux femmes.



Garder un enfant, une présence qui est en nous, que l’on ne voit pas, que l’on ne connaît pas, que l’on ne peut qu’imaginer, mais qui représente déjà quelque chose. Voilà ce qui arrive à Anna, étudiante dans une prestigieuse fac américaine pour apprendre l’art de la photographie, quand elle tombe enceinte pour la troisième fois. Cette fois ci, comme la première fois, c’est un accident. Sauf que cette fois, elle aime déjà cet enfant qu’elle n’attendait pas. Elle aime cette vie qu’elle est prête à accueillir de manière immédiate, contre toute idée rationnelle. Cette pulsion d’amour fait qu’elle ressent la nécessité de cette présence qui prend possession de son ventre, qui implante dans son esprit l’envie de l’aimer.


Cerise, elle, est une lycéenne solitaire quand elle tombe enceinte alors qu’elle ne le souhaitait pas. Elle a si peu conscience des choses, semblant flotter parmi la réalité, qu’elle ne s’inquiète pas réellement de ne pas avoir ses règles plusieurs mois de suite. Elle vit avec sa mère une relation tumultueuse, faite de heurts et des reproches qu’elle subit, et rencontre le besoin d’être aimée et protégée comme une enfant auprès d’un garçon qui ne se préoccupe pas d’elle. Quand elle sait qu’elle est enceinte, elle se heurte à sa mère, à son copain, mais c’est sa décision : ce qu’elle ressent, c’est le désir d’être aimée par son bébé. Elle le voit comme un être qu’elle saurait protéger et qui en retour l’aimerait de manière inconditionnelle.


Mais Cerise voudrait à la fois être une enfant et une mère, cherchant auprès de tous à retrouver la trace d’une affection qu’elle n’a jamais eu. Elle ressent tellement cette nécessité d’être aimée par quelqu’un, ce manque irascible, qu’elle répercute sans s’en rendre compte tout cela sur sa fille, Melody. Elle recherche la fusion dans la pulsion de l’amour. Elle souhaite le meilleur pour sa fille, mais ne se rend pas compte qu’elle la rêve plus qu’elle ne l’a laisse vivre. Que Melody existe plus dans son esprit de mère que dans la réalité. Irrémédiablement, les deux femmes se confronteront l’une à l’autre, Melody se construisant aussi à l’extérieur au moment de l’adolescence et rejetant sa mère, la vie précaire qu’elle mène, les choix qu’elle a pu faire, malgré leur amour mutuel.


Cerise et Anna connaîtront chacune l’ambivalence des sentiments de la maternité, ces fameuses « tempêtes » dont l’écriture traduit les tentatives d’apaisement. Mais ce qui les réunit est cette sorte de passion qu’elles vouent à leurs enfants, et qui s’exprime différemment.


On sent la joie et l’émerveillement d’Anna à voir grandir sa fille, puis à aimer son deuxième bébé. Comment ne pas aimer Lucy, cette enfant qui apporte poésie et réflexions... L’autrice nous fait aussi énormément ressentir l’élan maternel à travers Anna.

Cerise elle, est davantage tiraillée entre différents sentiments, tant sa relation avec sa fille adolescente devient conflictuelle, l’interpelle, crée des doutes, des questions, et la fera se confronter à ses manquements.

Chacune est forte, combative, attachante, même si parfois j’ai été tenté de détester Cerise, ou ai été agacée par Anna.


L’humanité des personnages, constituée de failles, surtout celui de Cerise, va de pair avec l’écriture enveloppante de Jean Hegland. On ressent énormément l’affection et la compréhension de l’écrivaine pour ses personnages, qu’elle a rendu combatives chacune à leur façon... Et à qui elle a, elle aussi, donné naissance dans son esprit.


Ce livre est pour ceux qui :


Se pose des questions sur la maternité, la difficulté d'être parent,

Veulent voir des héroïnes dans toute leur ambivalence, dans la gestion de leurs différentes identités (femme et artiste)

Et aimeraient une écriture fluide, belle, avec un versant sociologique



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